jeudi 28 février 2008

Les mamies




Nous en avons deux. Ma maman et la maman de Jean-Phi. Elles vivent à 850 kilomètres de distance l'une de l'autre, ont toutes deux la soixantaine, ont toutes deux le même amour commun pour nos trois filles....

Elles se connaissent, s'apprécient, et ont pris part à des vacances estivales avec nous (plus on est de fous, plus on rit!).... les filles étaient petites, elles étaient des mamies encore jeunes... nous "avons ouvert la marche" avec les petits-enfants... les "gagatisant" en premier... essuyant ainsi les premiers émois de grand-parents qui prendraient presque notre place de parents, tant ils sont plein d'amour pour leur descendance.... Pour Julie, c'était un défilé permanent, devant cette blondinette jolie qui prenait très à coeur son rôle d'ainée des petits enfants (rôle que Julie joue encore!!!)... chaque biberon était sollicité, chaque couche à changer était un honneur, chaque sourire était exclusif et enjoleur.... chaque "arrheu" était merveilleux... Quand on a vingt-cinq ans, comme c'était mon cas, lors de la naissance de mon premier bébé, on passe d'une sollicitude infinie pour ces chères mamies "gateuses" à un sentiment d'étouffement et d'expropriation pur et simple de son enfant... c'est normal... le besoin de se sentir aimée de son bébé est permanent, viscéral... on pense qu'il va nous confondre avec la mamie et nous bouder, nous ignorer, à jamais... On devrait nous dire avant l'accouchement que ces petits bébés dodus grandissent vite, et ne confondent jamais... ils savent, dès leur premier souffle, que vous êtes leur maman... que c'est vous, l'élu de leur coeur... il faut vieillir pour le comprendre... et entendre son enfant vous dire qu'il vous aime-vous adore-et ne vous quittera jamais-oh non jamais!!!!!.... pour être rassurée... être mère à 100%... et heureuse d'avoir des mamies aussi proches de leurs petits-enfants....

Les mamies ont des soucis... en ce moment. Le temps passe et des fois, des caps sont difficiles à passer. On vous annonce la pré-retraite, on vous promet que cela vous permettra de mieux profiter, de voyager, de vous lancer dans des combats associatifs... mais c'est sans compter sur les problèmes de santé qui se pointent alors que du temps où vous étiez en activité, rien ne vous tombait dessus... rien...

Ma maman a eu un AVC, ma belle-maman une pancréatite... alors qu'elles étaient encore dans la cinquantaine... bien en forme...
De ces "coups de la vie", elles sont ressorties différentes... affaiblies, sujètes à la déprime... où à l'inverse, elles sont des fois très exaltées, incontrôlables, hyper-actives... comme si l'entre-deux, la normalité, avaient donné place à deux comportements extrêmes... De plus, la gestion de la ménopause se greffe par là-dessus, éreintante... bref... rien de très facile à vivre... alors qu'elles avaient du temps devant elle... plein de temps.... et plein de projets en tête...
Ma maman est venue passer Noël ici cette année... elle a beaucoup dormi... n'a mis le nez dehors qu'une fois, et n'a eu goût à rien...
Ma belle-maman a eu une fin d'année mouvementée, suite à l'hospitalisation d'un de ses petits-fils pour un pneumocoque... elle s'est beaucoup donnée... Hier nous avons pris la journée pour aller lui rendre visite dans le Gers... où elle est hospitalisée pour passage dépressif, crises d'angoisse...
Si on m'avait prédit cela, à la naissance de Julie, et à celles de mes deux autres filles, j'aurais aimé leur donner chaque biberon à faire... chaque couche à changer... chaque sourire à regarder...
Si j'avais su que ma maman deviendrait quelqu'un d'autre suite à son AVC en 2001, et perdrait toute la combativité dont elle avait fait preuve toute sa vie, j'aurais sans doute choisi de ne jamais quitté Le Havre, de ne jamais devenir fonctionnaire... déménageant tous les 4 matins, pour une soit-disante sécurité de l'emploi que je n'ai même plus ... si j'avais su...
Je n'aime pas les regrets... je ne veux pas en avoir... je mène ma vie tambours battants... je pense être une oisive, j'aime la vie plus que tout... mais je ne supporte pas que quelqu'un que j'aime plus que tout reste sur le carreau... là... loin de moi...
Ma maman m'a dit une fois au téléphone... il y a deux ans de cela... que ce serait plus facile d'avaler la boîte de médicaments toute entière, celle prescrite pour son cholestérol, pour ne plus être dans cet état végétatif... celui qui la met à plat régulièrement, qui l'énerve tant... elle pleurait... me disait que de toute façon, elle n'avait jamais eu de chance dans sa vie... juste un répit entre ses trente-cinq ans, jour où elle a quitté mon père, et ses cinquante-cinq ans, jour de son AVC... que c'était court vingt ans de bonheur, pour toute une vie... qu'elle savait qu'elle n'en aurait pas plus maintenant, de belles années... elle a raccroché, déterminée à en finir, et m'a laissée avec mon impuissance, à 750km d'elle, complètement paniquée, prête à taper dans le mur et à me demander pourquoi cette femme si merveilleuse avait eu cette saloperie d'AVC...
Elle m'a dit un jour, qu'elle pensait que cet AVC découlait des années de violence conjugale qu'elle avait subi... qu'il avait grandi en elle, toutes ces années... pour éclater un jour, sournoisement... comme une tumeur qui s'infiltre lors d'un drame de la vie... attend... et s'annonce à vous un beau jour... alors que vous remontez tout juste la pente...
La vie ne pardonne rien...
Elle sait rappeler à l'ordre, tout le temps....

J'ai regardé ma belle-maman hier, en prenant l'air dans le petit jardin devant l'hopital où elle réside... elle était assise autour d'une table de jardin, la brise sur les joues, le regard pensif... les lèvres contractées par les anti-dépresseurs... j'ai pensé à la mienne, qui avait eu le même regard vide deux mois avant... je me suis demandée à quel moment, il faut avoir conscience qu'on est dans la meilleure partie de sa vie... à quel moment, il faut concrétiser son rêve le plus fou car après ce sera trop tard... à quel moment, il fait prendre le temps de vivre à fond car tout peut s'arrêter du jour au lendemain...
Je me suis demandée si je leur disais assez combien je les aimais... à toutes les deux...
J'ai pris ma belle-maman dans les bras avant de partir et je lui ai dit que je l'aimais...
J'ai appelé ma maman juste avant qu'on parte dans le Gers, la veille au soir, et je lui ai dit combien je l'aimais...

Le paysage du Gers, le trajet en voiture, ont eu un effet thérapeutique sur moi...
J'aime me "vider" la tête, me laisser aller, quand je suis passagère en voiture...
Je suis rentrée fatiguée mais toujours aussi persuadée que ce que je vis avec mes enfants chaque jour est un moment qui ne reviendra pas...
Je suis persuadée que les mamies auront encore plein de moments à partager avec mes filles...
Elles vont s'en sortir... je le sais...
J'ai confiance en la vie... j'ai confiance....

10 commentaires:

Pur bonheur a dit…

C'est tellement vrai qu'il faut profiter du moment présent, car il ne reviendra jamais!
Pour ta maman, sache que justement ces médicaments contre le cholestérol sont fait de statines qui sont très dures sur le corps. Pour en avoir pris moi-même durant 4 mois j'ai vu mon état de santé se détériorer peu à peu, douleurs musculaires , crampes du mollet toutes les nuits, fatigues chroniques et finalement état dépressif assez grave et tout ça à cause de ce foutu médicament. J'avais même perdu la moitié de mes cheveux. Ta mère doit faire partie de ceux qui comme moi sont intolérants aux statines. J'ai cessé ce médicament complètement. Mon cholestérol a monté mais je m'en fou, je n'avais plus de qualité de vie avec cette cochonnerie!

Véro a dit…

Merci ma Tangerine, je me sens moins triste, coupable, de savoir que ma maman a certainement un souci de tolérance face au médicament qu'elle prend... elle a souvent eu ce genre de cas, intolérance à la pilule contraceptive, intolérance aux oestrogènes pour la ménopause... un médecin lui a d'ailleurs dit que les oestrogènes étaient responsables de son AVC, pour te dire un peu la dangerosité de certains médics....
Un médecin lui a dit qu'elle ne devait pas arrêté ce traitement pour le cholestérol... sinon elle risquait un nouvel anévrisme... elle a si peur....
Et toi Tangerine, comment va ton bras??? tu suis un régime alimentaire pour ton cholestérol?
Je te fais de gros bisous...

mauxenne a dit…

tu sais véro la vie a un prix si sacrée je l ai vu par mes filles qui ont faillit passer l arme à gauche comme on dit alors qu elles étaient bébé, la vie est si fragile je sais pas combien de fois j ai pu dire à mes filles combien je les aimais, combien elles étaient importantes pour moi, ma grand mère m a apris à le dire des que j éprouvais le besoin car il faut le dire quand on a envie de le dire ce mot aimer et c est pas simple, je peux dire que le fait d avoir moi faillit mourrir par trois fois je sais que la vie est précieuse et qu il faut dire et devancer les questions que ceux qui nous entourent veulent pas nous poser.
J ai pris les devants un jour j ai réunit ma petite famille et j ai mis carte sur table en disant que j étais pas immortelle et que personne l était sauf que moi j avais peur d y passer plus tôt que prévu donc on s est dit qu il faudrait jamais prendre de détour aller au bout de ce que l on avait en nous même si mes filles me disent mais tu as que 45 ans tu es jeune bon ok apres elles rajoutent tout doucement chutt elle est vieille mdrrr bon enfin bref la vie peut s arrêter d un moment à l autre il faut pas attendre que quelqu un soit malade pour savoir qu elle a pas de prix.
il faut savoir aussi faire un certains deuil de notre entourage qui vieillit nos parents ou grand parents on peut pas vivre sur un nuage et se dire ils sont éternels il faut juste savourer chaque moment avec eux même si ils sont éloignés
je souhaite un bon rétablissement à ta belle mère et du courage pour tous ceux qui l entoure .

Corine et Olive a dit…

Je compare ma mère aux piliers d'une maison. Sans elle, tout s'écroule...Mais il faut se dire qu'un jour où l'autre, les gens que l'on aime, disparaitront...Nous ne sommes jamais préparé à une telle perte...car perdre quelqu'un de si proche, c'est perdre une grande partie de soi, ainsi que perdre une partie de son innocence d'enfant...

Pur bonheur a dit…

@ Véro: Si ta mère est sujette aux allergies il est fort probable qu'elle aussi soit intolérante aux statines. Mais si elle en parlait à son médecin il peut lui conseiller une autre sorte. Il y a 5 ou 6 médocs contre le cholestérol. Certains sont mieux tolérés.
Sinon mon bras me fait moins souffrir depuis que je le repose un peu. Et pour le cholestérol bah j'évite les aliments gras, je fais ce qu'il faut et aussitôt que ces amas de neige fondent je vais reprendre mes marches de 2km par jour dans la forêt.

Véro a dit…

@tangerine : je vais lui en parler. En fait je ne sais même pas quel marque de médicament elle prend au sujet du cholestérol... en tout cas, elle passe par des états de fatigue intenses, de déprime... elle ne bouge plus de chez elle... les médecins disent que ce sont les conséquences de l'anévrisme... que ce sera toujours comme ça... je veux bien que cela laisse des traces, mais elle avoue ne pas se reconnaître elle-même, ne pas comprendre...
Merci de me dire tout ça, je vais lui poser des questions, et en parler à mon médecin ici...
Je suis contente que ton bras aille mieux, le cheval a dû bien te bousculer, dis-moi? c'est sûr que le froid n'arrange rien au niveau des douleurs osseuses... j'espère que tout va aller mieux pour que tu reprennes tes marches très vite!!!
Gros bisous
Véro

Véro a dit…

@Corine : Je ne suis pas prête pour cela... pas du tout... même si je sais très bien la finalité de la vie, en ce qui concerne ma maman, comme celle de Jenfi, c'est inenvisageable dans ma tête...
bisous

Anonyme a dit…

Et voilà tu me fais encore chialer !
Bon je vais arrêter de te lire c'est pas possible. Il faut dire que le sujet du jour me touche particulièrement...
bises

Anonyme a dit…

C'est joli, ce que tu écris, mais tellement étrange pour moi qui n'ait pas ces rapports là, vraiment, tellement étrange..

Véro a dit…

@Fanette : j'ai lu ton blog, depuis le début... mais j'avoue avoir du mal à retracer ton enfance... j'attends que tu ré-abordes le sujet... si toutefois c'est quelque chose que tu souhaites faire...
Etiennette est bien ta belle-maman (nouvelle compagne de ton papa)???
On en reparlera ailleurs si tu préfères...
Merci pour ton com...
Bisous